Cette interrogation n'est pas nouvelle et reste toujours poser. Peut-on parler d'élaboration ou de révision constitutionnelle en Côte d'Ivoire ?
Mr Alioune Badara Fall, juriste, professeur de droit public et directeur du Centre d'études et de recherches sur les droits africains et sur le développement institutionnel des pays en développement (LAM-CERDRADI), a récemment eu un entretien sur RFI et a en fait, apporté son point de vue sur la question.
Selon lui, la réforme constitutionnelle est avant tout nécessaire. Aucune Constitution n’est éternelle et les conditions de sa réforme sont inscrites dans la Constitution elle-même. Pourquoi faut-il réformer la Constitution ? Pour l’adapter à des circonstances nouvelles qui surviennent dans un pays, provoquant des changements plus ou moins importants dans la vie de l'État ou de la société.
C'est le cas, par exemple, lorsque des traités sont signés par un État avec d'autres États, ou avec des organisations internationales. Ces traités influent nécessairement sur le fonctionnement de la vie politique du pays en question. Celui-ci doit alors modifier sa Loi fondamentale pour y inscrire les nouvelles dispositions. Mais toutes les réformes ne sont pas dictées par des impératifs objectifs.
En ce qui concerne le caractère de cette reforme constitutionnelle en Côte d'Ivoire, Mr Alioune pense plutôt qu'il faudrait dit révision au lieu d'élaboration d'une nouvelle constitution.
Tout d’abord, les discours tenus ici et là entretiennent une ambiguïté. S’agit-il d’une révision constitutionnelle ou de la mise en place d’une nouvelle Constitution ? Les éléments de discours des autorités, évoquant l’entrée en scène d’une IIIe République, laissent à penser qu’il s’agit d’une nouvelle Constitution.
Mais dans ce cas, il aurait fallu mettre en place une Assemblée constituante, qui seule est habilitée à adopter un nouveau projet de Constitution. Or, il semble que seules quelques dispositions de l'ancienne Constitution - mais tout de même importantes - ont été modifiées, et d'autres ajoutées. Dans ces conditions, il serait plus juste, d'un point de vue juridique, de parler de révision constitutionnelle, car les autres dispositions du texte fondamental actuellement en vigueur sont restées intactes. Il est moins question d'un avant-projet de Constitution que d'une Loi de révision constitutionnelle.
C'est cette dernière hypothèse qui me paraît devoir être retenue dans le cas ivoirien présent. Par ailleurs, plusieurs des nouvelles dispositions adoptées me semblent ambiguës ou en recul par rapport aux acquis démocratiques de la Côte d'Ivoire. Je considère notamment que ce pays régresse en abrogeant l’obligation de soumettre au référendum populaire toute nouvelle réforme des conditions d’éligibilité du président de la République. Cela permettra au président de faire adopter ces réformes importantes par voie parlementaire. C’est un véritable recul démocratique, a-t-il expliqué lors de son entretien le mardi 25 Octobre joint par RFI.
Le recul démocratique auquel faire allusion l'intervenant ressort en effet, de l'article l'alinéa 5 de l'article 177, donnant possibilité au Président de la République de réviser (modifier) la constitution, sans consulter le peuple.
On remarque qu'à la lumière du bref analyse fait par le professeur-chercheur Mr Alioune Badara Fall, cet avant-projet constitutionnel, présente une fois de plus, de nombreuses zones d'ombre qui demandent d'être sincèrement examinées sans préjugé, avec impartialité et beaucoup de bon sens.
SOURCE : RFI
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